Une notion sur laquelle les deux se rejoignent : le logiciel.

Faire faire à l’informatique ce qu’on ne ferait potentiellement pas nous-même. Longtemps (aujourd’hui encore) pensé comme vecteur de déshumanisation et du grand remplacement des humains par les machines, le principe du logiciel n’est pourtant pas dans l’optique de supprimer de l’équation les enjeux sociaux portés par l’humanité. Au contraire un logiciel peut tout aussi bien être émancipateur de sociétés (printemps arabes), permettre à des protestations d’être entendues (Greta Thunberg) par le biais des réseaux sociaux. Il tend alors à aider les femmes comme les hommes dans leurs tâches tout en leur offrant plus de possibilités, et étendant ainsi leur champ d’action. Mais, en effet, les polémiques font rage et exacerbent les traits pervers que peuvent prendre notre utilisation quotidienne de logiciels mettant en danger notre vie privée, notre démocratie, jusqu’à nos droits les plus fondamentaux tel que la liberté. Pour mieux comprendre à quelle point cette problématique n’est pas propre aux logiciels et comment nous pourrions en être arriver là, laissez moi faire une analogie à la façon de nous nourrir.

Pour se nourrir aujourd’hui, nous pouvons acheter notre nourriture ou la cultiver.

Chasser et pêcher aussi mais pour les animaux… on évite, n’est-ce pas ?

Un humain concerné par la cause animale

Rien n’empêche de faire les deux en fonction du besoin. Lorsque vous achetez de la nourriture, vous pouvez grossièrement vous diriger vers un supermarché qui vous permettra rapidement d’avoir ce que la majorité des consommateurs mangent quotidiennement. Monnayant une certaine somme vous aurez la nourriture qu’on vous propose et celle-ci répondra sûrement à vos besoins. Dans ce cas, vous aurez donc acheté une nourriture dont la provenance, la composition et l’impact social et environnemental ne tiendra qu’à la confiance accordé au supermarché.

C’est ainsi que la nourriture achetée en supermarché est analogue au logiciel propriétaire. Ils capitalisent d’ailleurs sur les mêmes méthodes : les habitudes de consommation pour les grands distributeurs comme d’utilisation pour les entreprises de développements logiciels. On paye pour un produit dont le prix, la composition et la méthode de développement ne dépend alors que du fournisseur. De la même manière, les supermarchés comme les logiciels propriétaires ont tout intérêt à accroître constamment leur nombre de ventes ou d’utilisations. C’est leur première motivation car c’est ce sur quoi se base leur modèle économique. Pourtant plus de ventes n’est pas un objectif qui converge directement avec celui de leur client. Lorsqu’un utilisateur cherche à avoir un logiciel toujours plus pratique et performant, le distributeur du logiciel cherchera lui seulement à le vendre à toujours plus de monde. Idem pour la nourriture et les supermarchés. Les deux tendances peuvent converger pendant un temps, mais il est certain qu’elles finissent par diverger. Réductions, obsolescence programmée, tout est prétexte à consommer, consommer, consommer.

Les intérêts de ces entreprises pour répondre à la satisfaction de la clientèle diminue d’ailleurs d’autant plus vite qu’ils possèdent le monopole. Une fois atteint, le distributeur du logiciel va amener ses utilisateurs à toujours plus de temps d’utilisation de son logiciel, comme les supermarchés vont chercher à attirer leurs clients pour qu’ils viennent toujours plus souvent dans la semaine. On peut à ce moment là être sûr qu’améliorer la qualité de leur produit et de leur service sera le dernier de leurs soucis. Ils privilégieront l’aliénation, le fait de susciter chez nous la prise d’habitudes perverses qui leur sont rentables. On voit donc que la place du consommateur ou utilisateur reste vraiment secondaire face à ce modèle. Pour bien comprendre, prenez l’exemple de la nourriture contenant des additifs. Certes ils donnent meilleur goût. Mais l’impact sur votre santé physique par les substances cancérigènes, ou mental par l’addiction, devraient actionner la sonnette d’alarme. Néanmoins, vous y pourriez y concédez par esprit de praticité. Et oui, je parle bien de la fameuse petite supérette en bas en la rue. Ce modèle plus vieux que l’informatique se joue de l’humain plus que le logiciel à lui seul ne peut le faire.

Mais alors quid du logiciel libre ? Et bien comment se nourrit-on autrement ? En cultivant son potager. Les communautés du logiciel libre sont des sortes d’AMAHP dans lesquelles tous les contributeurs sont aussi des utilisateurs et s’assure eux mêmes du bon développement du logiciel en se basant sur leurs besoins réels. Pensez un logiciel libre comme un potager ou chacun montre comment faire pousser tel ou tel aliment. Certes c’est moins pratique que la supérette mais vous maîtrisez tous les autres aspects (la provenance, la composition…). Par cette méthode privilégiant la transparence et la contribution extérieure, on peut s’assurer des valeurs et de l’éthique portées par le produit qu’on utilise ou consomme. De la même manière, on réduit un clivage social ou seul l’argent permet car le logiciel est à tout le monde, libre. On dit d’ailleurs souvent fait par vous et pour vous. Les codes sources de programmation sont ouverts et accessibles à tous permettant à chaque personne ayant la compétence d’amener sa pierre à l’édifice. Ce modèle est un vrai vecteur d’innovation et est le seul à ce jour permettant d’assurer la convergence d’objectif tant pour les développeurs que les utilisateurs.

L’histoire du logiciel libre est loin des idées reçues. A l’initial le principe de propriété sur le logiciel n’avait pas lieu, c’est un droit accordé par les lobbys de brevets friands de nouveaux dépôts. Il ne venait à personne l’idée de vendre du code lorsqu’on vendait principalement du matériel. Le logiciel était donc par défaut libre.